Quand les femmes qui réclament leur titre sont « immodestes »

Publié le 12 février 2020 par Elisabeth Debourse
Quand les femmes qui réclament leur titre sont « immodestes » Photo de Honey Yanibel Minaya Cruz via Unsplash

Simples épouses pour le Larousse et « immodestes » pour la toile, les femmes qui font valoir leurs compétences et un titre ne sont pas toujours bien vues par leurs pairs.

« Mademoiselle », « la petite dame » ou « ma jolie » ne sont qu’un maigre échantillon de tous les appellations qu’une femme se voit attribuer tout au long de sa vie, la grande majeure partie du temps, sans qu’elle ne l’ait demandé. Pourtant, de véritables titres, gagnés à la sueur de son front, elle en a parfois. « Docteur » par exemple, après avoir bouclé une thèse de plusieurs années, gagné le respect de son milieu et être devenue une experte de son sujet. Dans ces cas-là pourtant, étrangement, sa distinction n’est parfois pas reconnue par ceux qui l'entourent. Un syndrome suffisamment courant pour être devenu un hashtag tendance.

Sur Twitter, le #ImmodestWomen est de retour, après plusieurs incursions sur le réseau social ces dernières années — preuve que le problème de la reconnaissance des femmes et de leurs compétences n’est toujours pas réglé. L’une d’entre elles expliquait déjà en 2018, sans fards : « Mon titre est Docteur Fern Riddell, pas Madame ou Mademoiselle Riddel. Je le porte parce que je suis une experte, et que ma vie et ma carrière consistent à incarner cette experte de toutes les manières possibles. J’ai travaillé dur pour obtenir cette autorité et je ne la laisserai à personne d’autre ». Le comble étant que si le hashtag est réapparu aujourd’hui, c’est parce que des femmes mentionnant « Dr » dans leur biographie ont été reprises pour « manque de modestie »…

« La femme d’un boulanger »

Cette déconsidération pourrait n’être le fait que de quelques individus, si elle n’était pas en réalité ancrée dans notre système, à commencer par celui défini par les dictionnaires. C’est ce qu’a récemment rappelé une internaute, Diane Moinet, après avoir découvert certaines descriptions du Larousse en ligne. On apprend ainsi que « présidente », nom féminin, est la « femme d’un président ». La boulangère, elle, est la « femme d’un boulanger, qui travaille à la boutique ». Cerise sur le gâteau, si un guerrier est une « personne qui fait la guerre », une guerrière est quant à elle, au choix, une « jeune fille, jeune femme qui revendique avec agressivité et violence sa place dans la société » ou une « militante infatigable de la condition féminine ». Si la page définissant le terme « présidente » a été supprimée depuis, « il reste encore beaucoup de définitions inadmissibles en 2020 », estime Diane Moinet.

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La définition de "boulangère", selon le Larousse en ligne. ©Capture d'écran

Conscient de cette invisibilisation des expertes, le site Expertalia.be, lancé par l’association des journalistes professionnels de Belgique, rassemble les profils de spécialistes de leur domaine — femmes et hommes issus de la diversité, puisque ces derniers sont eux aussi touchés par le même dédain médiatique. En place depuis 2015, The Brussels Binder est une autre base de données dédiée à l’amélioration de la visibilité des femmes, cette fois dans le débat européen. De manière à ce que bientôt, il ne sera plus possible de nier la qualité des femmes dans leur domaine respectif.

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