Témoignages : « mon métier c’est femme au foyer »

Mis à jour le 8 mars 2022 par Noemi Dell'aira
Témoignages : « mon métier c’est femme au foyer » ©Shutterstock

Elles ont décidé de mettre leur carrière professionnelle en stand-by pour se consacrer totalement à leur foyer. Choix conscient assumé ou perpétuation d’un schéma traditionnel encore bien ancré ? Victimes d’un système patriarcal avilissant ou évadées d’un système économique écrasant ?  

Être femme au foyer, selon saint Wikipédia, signifierait ceci : « Une femme qui réalise la majeure partie des tâches qualifiées de ménagères, telles que : l’entretien du logis, les achats de consommation courante, la préparation des repas, la surveillance et l’éducation des enfants. » Traduction : une femme n’ayant pas d’activité professionnelle lui rapportant un salaire. Des femmes de l’ombre qui, elles aussi, bossent dur et ne demandent qu’une chose : un peu de reconnaissance. 

Femme au foyer : réalité VS idées reçues 

« Je suis femme au foyer depuis presque cinq ans », confie Audrey, 29 ans et maman de trois filles (4 ans, 2,5 ans et 2 mois). Son quotidien ? Ménage, lessives, lave-vaisselle, bain des enfants, repas, rendez-vous médicaux, factures, courses… En gros, tout. Au début de sa première grossesse, il lui était impossible d’être productive au travail. La faute aux nausées. L’avis du médecin était clair : elle devait se ménager. Un conseil plutôt simple, mais impossible à suivre quand on bosse dans l’hôtellerie. D’un commun accord avec son mari, il a été décidé qu’Audrey resterait à la maison jusqu’à l’accouchement. « Quand ma fille est née, j’ai décroché un boulot en télétravail qui, je le pensais, serait parfait dans ma situation. Après quelques jours, j’ai malheureusement dû arrêter, car il m’était impossible de m’occuper de mon bébé qui pleurait sans arrêt et de traduire des consultations médicales par téléphone. » Ce qui l’a également poussée à devenir « mère au foyer », c’est le manque de place dans les crèches et… la culpabilité. « Je ne voulais pas que quelqu’un d’autre élève mon enfant, donc la solution était là. Mon mari a toujours été super compréhensif et m’a toujours soutenue dans mes choix, même si ça impliquait un salaire en moins. » Sa famille, quant à elle, n’a pas réagi aussi bien que son partenaire. « Ma maman, qui est une femme très indépendante, ne comprenait pas mon choix. Elle trouvait ça dégradant de dépendre de son mari. Mais en prenant conscience de tout ce que cela impliquait, elle a changé d’avis. Par contre, les autres membres de mon entourage pensent que je ne fais rien de mes journées, que j’ai la vie facile. Ils et elles sont avocat·e·s, vétérinaires, ingénieur·e·s, pilotes… Et je ressens qu’ils et elles ne me considèrent pas à leur niveau. »

« On a souvent insinué que j’étais incompétente, idiote, fainéante, ou encore soumise… », indique Charline, 42 ans et « femme au foyer » depuis 9 ans. Elle ajoute : « Or, ce que je fais aujourd’hui est bien plus dur que tous les jobs que j’ai pu exercer. Quand on me demande ce que je fais dans la vie, j’ai peur de le dire. Je me sens honteuse, je vois le jugement dans le regard des gens. Mais d’un autre côté, je me sens tellement chanceuse d’être là pour mes enfants, de les voir grandir, de ne rater aucune étape. Ça ne veut absolument pas dire que je critique les femmes qui ne font pas comme moi. Justement, j’admire celles qui arrivent à concilier vie pro et vie de famille. C’est juste que, personnellement, je n’y trouve pas mon équilibre. » 

Un renoncement qui s’accompagne d’un moment d’adaptation. « Au début, c’était très difficile de dépenser l’argent de mon mari. Par exemple, je trouvais ça ridicule de lui acheter un cadeau d’anniversaire avec son argent. Je me sentais coupable d’aller dans un magasin pour m’acheter un nouveau pantalon, ou encore d’aller chez le coiffeur… », complète Charline. 

Un rôle antiféministe ? 

En 2020, on comptait environ 300.000 personnes au foyer de moins de 65 ans en Belgique, dont 95 % de femmes. En 1986, ce chiffre était de près d’un million, selon une étude réalisée par l’Institut pour un développement durable (IDD). Si, à l’époque, la croyance générale tendait vers le fait que les femmes étaient prédisposées à s’occuper des enfants et des tâches ménagères, les évolutions sociales et sociétales ont motivé les femmes à développer leurs carrières

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