Vivian Hoorn: ses conseils pour apprendre à s’accepter

Publié le 5 décembre 2022 par Marie Guérin Photos: Michael Ferire
Vivian Hoorn: ses conseils pour apprendre à s’accepter © Michael Ferire

Imaginez cette femme nue, au coeur du sublime jardin du Musée Van Buuren en fleurs. Elle déambule au milieu d’une équipe de 15 personnes, elle rit, elle bouge, elle pose. Elle est l’image de l’assurance, de la féminité épanouie. Cette femme, c’est Vivian Hoorn, et j’ai tenté de percer son secret.

L’influenceuse néerlandaise n’a qu’une seule phrase dans la description de son compte Instagram qui affiche presque 600k : « More self love my love. » Elle en a fait la pierre angulaire de son média : transmettre la confiance en soi aux femmes, les élever, mais aussi partager leurs insécurités. En dix ans, la jeune mannequin peu confiante s’est transformée en une femme d’affaires qui a décidé de faire de son expérience, l’acceptation de soi, le coeur de son agence Scala et de la marque de vêtements curvy qu’elle lancera début 2023. J’ai découvert une personnalité généreuse et passionnante qui, tout en conservant une certaine légèreté, n’a pas peur d’aborder les sujets de fond, ceux qui piquent. Le poids, la taille, la peau, le sentiment d’imposture, le
rejet, et l’amour. Évidemment.

Vivian, vous vivez aujourd’hui à Ibiza (quelle chance !), mais aussi un peu à Amsterdam. Où avez-vous grandi ?

J’ai grandi dans une ferme à Rossum, c’était un mode de vie en plein air avec des animaux. J’allais à l’école du coin et menait une vie simple et confortable. Mes parents n’étaient pas agriculteurs, mais dans ce genre de village toutes les maisons sont d’anciennes fermes rénovées, remplies d’animaux. Les oies, poules, canards courant dans la maison (rires). C’est la raison pour laquelle je cherche maintenant une vie plus calme et paisible. J’ai adoré Amsterdam, mais c’était trop intense pour moi. C’était agréable pendant une longue période, quand j’étais jeune, mais en vieillissant, j’ai pensé que j’avais besoin de plus de nature autour de moi. Nous avons choisi d’avoir une petite maison à Ibiza comme maison de vacances d’abord. Et finalement nous avons décidé d’amener les chats pour qu’ils profitent de cette vie en plein air. Nous passons désormais plus de temps ici qu’à Amsterdam.

Vivian Hoorn
(c) Michael Ferire

En « vieillissant », mais vous êtes toujours très jeune. Avez-vous senti un changement de cap à l’approche de la trentaine ?

J’ai eu 30 ans en septembre et, même si je suis toujours la première à être excitée à l’idée de fêter mon anniversaire, je me suis plongée dans l’année écoulée en me demandant : « Est-ce que j’en ai assez fait ? Suis-je à l’endroit où je voulais être ? En ai-je profité au maximum ? » Je suis sortie de la vingtaine, et je n’ai jamais été aussi contente de moi, mais je sens que c’est une nouvelle partie de ma vie. Mes amis se fiancent, se marient, ont des bébés ou essaient d’en avoir. Je sais que j’aspire à ce style de vie, mais je ne sais pas encore si j’y suis prête. Beaucoup de réflexions sans réponse en ce moment (rires) !

Comment vous êtes-vous retrouvée à Amsterdam ?

Mon oncle avait une maison là-bas. À 17 ans, j’ai commencé le mannequinat et ensuite une école de stylisme, Artemis. J’ai bien aimé, mais c’était vraiment dur. Je ne suis pas le genre de personne qui lit un livre et le garde en tête (rires). J’apprends en expérimentant. Quand j’ai quitté l’école, mon père qui est entrepreneur m’a encouragée à lancer ma marque, mais je ne le sentais pas. Je faisais toujours du mannequinat et j’aimais la photographie. J’avais un blog de mode, je rencontrais des filles que je prenais en photo, je faisais beaucoup de streetstyle, les gens ont commencé à me demander de shooter leur lookbook. Ensuite, Instagram est arrivé, et j’ai rencontré mon agent, Esmee Velmans. C’est comme ça que ma carrière a débuté.

Vous êtes devenue mannequin à 14 ans. Quels étaient vos rêves à l’époque ?

J’ai toujours su que je voulais aussi être créative : sur les shootings, j’étais toujours avec l’équipe de photographes et de stylisme en train de réfléchir au concept. Je sentais que j’avais plus que le mannequinat en moi. Puis, à l’école, j’ai pensé que je deviendrais designer puis j’ai pensé que je deviendrais photographe. Je me suis d’ailleurs mis beaucoup de pression parce que je pensais qu’il valait mieux être très bon dans une chose sans m’arrêter de faire un peu de tout. La carrière de mannequin est très difficile. Personne ne voulait de moi: quand j’avais 14 ans, je n’étais pas assez maigre, j’étais vraiment maigre… mais pas assez. Il fallait faire une taille 32, j’avais un 36 ! Aujourd’hui, ça me semble ridicule.

Quel était votre rapport avec votre corps à ce moment-là ?

J’ai toujours eu des hanches plus larges et j’ai dû perdre beaucoup de poids. Entre mes 16 et 20 ans, je me suis vraiment concentrée sur la perte de poids, la minceur était l’objectif à atteindre pour réussir. Alors j’étais maigre, je ne m’aimais pas. Je ne souffrais pas d’anorexie, mais être maigre était mon objectif. Le problème, c’est que j’aimais tellement la nourriture que parfois je l’oubliais, c’était schizophrénique. Un dimanche avec ma famille, nous étions en train de manger, je vivais l’instant. Je me souviens encore de la culpabilité qui m’a envahie juste après. J’ai littéralement pleuré devant le miroir. Je me détestais parce que je n’avais pas la discipline de ne pas manger. À certains moments, je reprenais du poids et les gens autour de moi pensaient : « Enfin, Vivian est de retour ! » Et c’est comme ça que j’ai su qu’il fallait que j’arrête. J’ai quitté le mannequinat pour me concentrer davantage sur la partie créative. J’avais 19 ans.

Vivian Hoorn
(c) Michael Ferire

Est-ce que le mouvement body positive a changé la perception du corps ?

Je suis vraiment reconnaissante que les marques et les magazines aient enfin vu qu’il fallait montrer plus de corps ronds. Si on les diffusait déjà dans le passé, cela ne semblait pas fonctionner en matière de ventes, mais maintenant c’est le cas. En revanche, ce qui me fait peur, c’est quand je vois les défilés de mode revenir aux mannequins des années 90 avec des jeans taille basse, des hauts courts et des filles très maigres sur le podium. Je vois beaucoup de gens célèbres maigrir à nouveau. Autour de moi, les filles se sentent à nouveau en insécurité parce que les médias montrent à nouveau des femmes maigres. J’étais tellement heureuse de voir à nouveau dans la mode des femmes de taille 38 ou 40. Maintenant, je vois que beaucoup d’influenceurs et influenceuses redeviennent très maigres. Le changement est plus intense et j’ai l’impression que nous sommes un peu en recul sur les acquis des trois dernières années : il y a à la fois une plus grande diversité en matière de tailles et un retour de la maigreur. Je suis une femme qui a confiance en elle, mais je n’irai jamais au restaurant avec un cropped top et un jean taille basse. J’aime mon ventre, mais je ne dînerais pas comme ça (rires) ! Ce serait mieux si plus de marques proposaient des vêtements à ma taille, 42… Raison pour laquelle je lance ma marque !

C’est un scoop ! Je veux tout savoir. D’où vient ce projet ?

Je travaille avec beaucoup de marques dont la plus grande taille est le 40 ou 42. Je ne peux même pas porter de pantalon. Il y a tellement de marques sur le marché, mais tellement peu qui proposent une large variété de taille. Je sais maintenant avec la production à quel point il est difficile de faire une collection allant du 34 au 50. Cela coûte beaucoup d’argent à produire. Je vais donc proposer des pièces extensibles qui peuvent s’adapter à plus de tailles, mais qui sont avant tout pensées pour les courbes. Nous la lancerons en mars-avril, mais je n’ai pas encore tranché sur le nom. Nous produisons au Portugal avec de belles matières et un objectif durable. Cette marque, c’est mon style : des vêtements casual chic, du luxe abordable. Ainsi, une personne de taille 36 ou 48 pourra se sentir tout aussi confiante.

En parlant de confiance… Comment vous sentez-vous aujourd’hui avec votre corps ?

Je pense que c’était un long processus d’acceptation. Tout le monde aimerait avoir la recette secrète pour se sentir en confiance. Jeune, je me détestais vraiment. J’étais dégoûtée par mon apparence. Et quand j’y pense aujourd’hui, je me dis « babe, c’est quoi ce bordel (rires) ? »  À un certain moment, ma santé mentale n’était pas très bonne non plus. Je me harcelais toute la journée : en me regardant, je me disais que j’étais moche. J’ai commencé une thérapie. Toutes les semaines depuis maintenant deux ans, je répare le fruit de ces expériences négatives dans le mannequinat, d’amis malveillants et ex-petits amis toxiques. Je suis une personne très émotive, donc si quelqu’un me dit quelque chose de négatif, je le garderai à l’esprit pour toujours. Chaque fois que j’ai des pensées négatives sur moi-même, je pense : « OK, c’est juste une pensée, ce n’est pas réel, je suis une femme adorable, j’aime mes courbes, les gens m’aiment pour mes courbes, être ronde ne fait pas de moi une femme imparfaite. Qui décide de ce qui est parfait ? » 

Vivian Hoorn
(c) Michael Ferire

Qu’est-ce qui vous a aidée à prendre conscience de votre beauté ?

Je pense qu’un facteur positif a également été la rencontre avec mon petit ami, Rien. Il m’aime vraiment pour qui je suis. Je me souviens d’un moment, allongé dans mon lit, il me touchait le bras en disant « c’est tellement bon et juteux ». J’ai compris que je pouvais être sexy. À un moment donné, j’ai publié un post Instagram sur mon apparence, mais aussi sur la façon dont je peux avoir l’air maigre devant le miroir puis m’asseoir et changer totalement la perspective que l’on a sur mon corps. J’ai eu tellement de réactions positives que je me suis sentie vraiment bien. Les réseaux sociaux m’ont donné le sentiment que j’étais digne de montrer mes insécurités et d’être vraie. Je reçois encore chaque jour des messages de personnes disant que je change leur vie en étant moi-même. Et je dois être honnête, ma carrière a fait un bond en avant quand j’ai pris du poids. Ça m’a donné cette personnalité qui faisait de moi plus qu’une simple jolie blonde assise dans un coin. Alors, en définitive, c’est la thérapie qui m’a beaucoup changée. Transformer la pensée négative en positive même sans y croire, d’ailleurs, je me dis toujours « Bella Hadid veut être toi ! » J’arrive à m’en convaincre: « Viv’ tu es un p***** d’ange (rires) ! »

Bella Hadid vous suit sur Instagram ?!

Non, absolument pas ! Elle ne sait pas du tout qui je suis (rires) ! Si on peut se sentir moins bien en se répétant de mauvaises choses, on peut également se sentir mieux en s’en disant de bonnes. Cela a beaucoup changé pour moi. J’ai pu guérir en étant plus consciente de mes sentiments et en comprenant l’origine de mes insécurités : harcèlement au lycée, mes ex-petits amis destructeurs ou les amis peu bienveillants. De 14 à 18 ans, on est si vulnérable : je pense que ça devrait vraiment être un sujet à l’école. Avoir plus conscience de la santé mentale et de la confiance en soi, je pense que c’est vraiment plus important que d’apprendre les mathématiques à ce stade. Maintenant que nous avons tous une calculatrice sur nos smartphones (rires) !

Avez-vous encore des insécurités de certains aspects de votre corps ?

Je ne peux pas dire que je suis 100 % en confiance avec mon corps. Bien sûr, parfois, je suis debout devant le miroir et je ne peux plus porter mon pantalon préféré, je me sens lourde, et c’est encore pire quand j’ai mes règles. Je dis beaucoup de conneries parfois ! Je suis très heureuse d’avoir une belle peau qui contribue à ce que je me sente sexy. Mais quand j’ai arrêté ma contraception, des éruptions cutanées et des boutons sont apparus. D’ailleurs, pendant le shoot pour la cover, j’ai demandé que le photographe évite les gros plans dessus. Il pouvait photographier mes bourrelets sous tous les angles, mais les boutons, c’est une autre histoire… C’est quelque chose sur lequel je travaille vraiment. Heureusement, je n’en ai pas sur le visage, car je fais beaucoup de soins de la peau. J’ai écrit un post Instagram à ce sujet et beaucoup de gens m’ont donné des conseils. Quand je ne me sens pas bien à propos de quelque chose, je m’ouvre et les gens m’aident à me sentir mieux parce que je ne suis jamais seule. Je préférerais bien sûr avoir une peau nickel comme avant, mais je dois l’accepter. 

« J'aime mes courbes. Être ronde ne fait pas de moi une femme imparfaite »

On voit sur vos photos que vous n’hésitez pas à mettre en scène vos bourrelets, votre ventre et les volumes de votre corps. Est-ce une façon de montrer la photogénie des rondeurs ?

J’ai toujours aimé les courbes ! Quand j’avais 11 ans, mon rêve était d’avoir de très gros seins (rires). Quand j’ai pris du poids, j’ai vu mon corps changer et j’ai aimé les formes de mon corps, je suis toujours en train de m’entraîner pour le maintenir ferme et le façonner de cette façon. Mais je pense que j’ai de bons gènes : je suis une copie de ma mère ! Lorsqu’on regarde les peintures anciennes, les statues, les sculptures, on voit cette beauté du corps rond. C’est une très belle esthétique. On se sent mieux en réfléchissant de cette façon.

Parlez-moi de votre agence de mannequins, Scala. Quel est son but ?

Nous avons commencé à y travailler avec Esmée, il y a 5 ans. À ce moment-là, j’étais encore mannequin, j’écumais les shootings et les événements et j’ai rencontré des filles qui ne trouvaient pas d’agences parce qu’elles étaient trop « grosses » ou trop « petites ». On a décidé de les aider ! Nous avons commencé Scala et maintenant nous grandissons vraiment rapidement en faisant une différence sur le marché parce que nous ne regardons pas le nombre d’abonnés, la taille ou les formes, mais plutôt la personnalité. Nous n’avons jamais eu l’ambition d’avoir une grande agence, de signer des grands noms et de gagner beaucoup d’argent, nous l’avons fait pour ce que nous aimons : construire de belles personnalités et aider les filles et voir des projets à long terme. Et je vois que ça marche.

Vivian Hoorn
(c) Michael Ferire

C’est quoi être influenceur aujourd’hui ?

Tout le monde veut et peut être un influenceur. Je vois de nouveaux visages venant de la téléréalité, de la télévision, de TikTok, qui grandissent très vite. J’ai l’impression que c’est plus facile maintenant qu’il y a dix ans. De mon côté, je me concentre sur Instagram, j’aime vraiment inspirer les gens et créer de beaux contenus, collaborer avec des marques, je n’ai jamais pensé travailler autant. J’aime aussi être plus dans les coulisses, avec ma marque de vêtements. Mais si les gens me demandent si j’ai un plan sur cinq ans… je ne sais pas ! Je suis heureuse où je suis maintenant. J’ai de la chance d’avoir ce que j’ai. Je n’ai jamais pensé quand j’étais mannequin à l’époque que je ferais la couverture d’un magazine.

Qu’est-ce qui vous inspire ? 

Ce qui m’inspire vraiment et qui me rend le plus heureuse, ce sont… les animaux ! Il y a deux semaines, je ne me sentais pas bien, mon moral était à plat et je me suis dit que je devais faire quelque chose qui me rendrait vraiment heureuse pour la journée. Je me suis rendue au refuge, ici à Ibiza, pour les aider. J’ai senti que j’avais vraiment un but. Aider les animaux, les nourrir, nettoyer, construire, c’est vraiment génial. Un jour où j’aurai plus de temps (quand je créerai plus de temps !), c’est quelque chose que je veux faire moi aussi : m’impliquer dans le refuge d’Ibiza ou avoir le mien. 

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