Une annonce historique… presque passée inaperçue
Le 14 avril dernier, la Ligue danoise de lutte contre le cancer a discrètement lâché une bombe d’espoir : « Même avant 2040, si peu de femmes pourraient être touchées par la maladie qu’elle pourrait être considérée comme éliminée. » Ce serait une première mondiale. « Ce sera la première fois qu’un type de cancer disparaît », insiste l’institution. Et pourtant, l’info a eu du mal à percer dans le bruit ambiant. Dommage, car elle raconte bien plus qu’un simple succès sanitaire.
Une guerre contre le papillomavirus
À l’origine de cette révolution ? Trois piliers : une couverture vaccinale quasi exemplaire, une politique de dépistage efficace et un suivi rigoureux des patientes à risque. En ligne de mire : le papillomavirus humain (HPV), un virus sexuellement transmissible responsable de près de 100 % des cancers du col de l’utérus.
Au Danemark, la vaccination est gratuite. Introduite chez les filles dès 2008, elle a été élargie aux garçons en 2019. Résultat : 89 % des jeunes de 12 ans reçoivent aujourd’hui la première dose du vaccin — un chiffre impressionnant, frôlant l’objectif de 90 % fixé par l’OMS. Côté dépistage, 60 % des femmes danoises participent régulièrement aux campagnes. C’est moins que l’objectif idéal (70 %), mais largement suffisant, combiné à la vaccination, pour faire chuter l’incidence de manière spectaculaire.
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Une victoire collective
Flashback. Dans les années 1960, le cancer du col de l’utérus était le troisième cancer le plus fréquent chez les Danoises. En 2024, il est descendu à la treizième place. L’incidence est aujourd’hui inférieure à 10 cas pour 100 000 femmes, contre 40 à l’époque. Et chez les 20-29 ans ? On est déjà à 3 cas pour 100 000, soit en dessous du seuil d’éradication défini par l’OMS (4 cas pour 100 000). Autrement dit, l’objectif est quasiment atteint pour les nouvelles générations. Ce succès ne s’explique pas uniquement par la rigueur danoise ou une administration bien huilée. Il repose surtout sur une collaboration interdisciplinaire entre virologues, médecins, biologistes et épidémiologistes.
Et la France et la Belgique dans tout ça ?
Le contraste est saisissant. En France, le taux de vaccination contre le HPV plafonnait à 28 % en 2020, pour atteindre environ 48 % en 2023. En Belgique, côté francophone, un adolescent sur deux était vacciné l’an dernier. Loin, très loin des 89 % danois. Le dépistage ? Correct, mais inégal. Et surtout, le tabou autour des MST et IST (et de la sexualité des jeunes) freine encore les campagnes d’information.
« Si nous voulons réussir à éradiquer le cancer du col de l’utérus, il est nécessaire de surveiller les écarts sociaux et ethniques, et de proposer des solutions concrètes comme les tests à domicile », recommande la Ligue danoise. Parce que oui, l’accès au soin, l’éducation et la culture jouent aussi un rôle central.