Loena Hendrickx : une patineuse belge parmi les meilleures du monde

Publié le 20 mars 2023 par Eveline Janssens et ELLE Belgique Photos: Carmen De Vos
Loena Hendrickx : une patineuse belge parmi les meilleures du monde © Carmen De Vos

La patineuse artistique Loena Hendrickx compte parmi l’élite mondiale de sa discipline. Forte d’une confiance inébranlable dans ses triples sauts, elle combine l'élégance et la souplesse d'une ballerine. Vice-championne du monde, elle a déjà participé deux fois aux Jeux olympiques et figure parmi les grandes favorites des championnats d'Europe qui ont lieu fin janvier. L'ambassadrice de la marque Chique Sport brille par ses chorégraphies extraordinaires et ses tenues uniques. ELLE a rencontré Loena juste après sa médaille de bronze en finale du Grand Prix, la compétition la plus importante de l'automne. Son objectif ? « Faire grandir un petit sport ! »

Sommaire

À quatre ans, vous vous êtes lancée sur les traces de vos trois frères aînés, tous patineurs. Les deux plus âgés pratiquaient le hockey sur glace, tandis que Jorik (autre patineur belge de haut niveau) suivait des cours de patinage artistique. Comment s’est passé l’apprentissage ?

En Belgique, j’étais une excellente patineuse. Mais lors de ma première expérience à l’étranger, j’ai remarqué que j’avais un sérieux retard. J’ai travaillé dur et je suis parvenue à accéder très jeune au circuit senior. Lors de mon premier championnat d’Europe, j’ai terminé septième ; et lors de mon premier championnat du monde, j’ai décroché ma qualification pour les Jeux de 2018.

À l’époque, vous êtes passée d’une écolière harcelée à une athlète de haut niveau. 

Mes années d’école primaire ont été difficiles. Les enfants peuvent se montrer cruels et jaloux sans le vouloir. Avec mes nombreuses médailles et absences les jours de compétition, je passais pour une outsider. Après une journée d’échange où Jorik et moi sommes allés nous entraîner aux Pays-Bas, j’ai crié haut et fort que je voulais faire ça tous les jours. Le soir même, Jorik a fait des recherches sur les meilleures écoles de sport néerlandaises et j’ai atterri dans l’enseignement aux Pays-Bas avec un statut de sportive de haut niveau. Je me suis totalement épanouie là-bas.

Ce même Jorik, après une impressionnante carrière de patineur, est mainte- nant votre entraîneur. Vous arrive-t-il parfois d’avoir envie de vous balancer des patins à glace ?

Bah, ça se passe plutôt bien (rires). Si on se dispute, c’est surtout pour des broutilles. Il connaît parfaitement ma personnalité et mon corps, et a lui-même patiné au plus haut niveau. J’ai senti que mon ancienne coach (Carine Herrygers) avait perdu un peu confiance en elle face à l’augmentation de mon niveau.

Après plusieurs saisons marquées par les blessures, vous êtes revenue reboostée à l’issue du confinement. Une confiance essentielle, car à votre niveau, tout se joue dans la tête ?

Maîtriser les sauts et les pirouettes prend des années. Une fois au plus haut niveau, c’est la plus forte mentalement qui gagne. Il faut croire en soi et en ses capacités. Je suis en fait assez timide, mais devant un public de milliers de personnes et un jury de neuf membres, je me sens forte sur mes patins. Ma confiance est mon meilleur atout.

Autre trait qui vous distingue : votre âge.

(Rires) 23 ans, c’est plutôt vieux pour une patineuse artistique. Le physique parfait pour le triple ou le quadruple saut est un corps de petite taille, caractéristique d’une fille en pleine puberté. J’ai déjà vécu ma transformation de femme et je suis toujours au top. Un corps de 20 ans est davantage mis à rude épreuve pour accomplir ce type d’exploits. Puis à mon âge on réfléchit beaucoup plus. À 15 ans, on saute en mode pilote automatique parce qu’on n’a rien à perdre.

À propos des jeunes de 15 ans, on pense immédiatement aux patineuses russes qui ne sont pas autorisées à concourir en raison de la guerre en Ukraine.

Oui, je les observe, et je me demande comment ces jeunes filles aux jambes si maigres parviennent à réaliser des quadruples sauts. Sérieusement, comment font-elles ? Je ne sais pas. Mais le podium a toujours été trusté par les Russes. Moi et mes homologues américaines ou japonaises avons concouru pour les places 4, 5 et 6. Le champ de la compétition est désormais complètement ouvert. Seuls 4 points séparent les meilleures du top 6, c’est très excitant. L’Union internationale de patinage a relevé l’âge minimum de 15 à 17 ans après le scandale de dopage de Kamila Valieva. J’espère que ça rendra sa féminité au patinage artistique.

Le jury apprécie vos programmes matures dans lesquels vous osez affirmer votre féminité.

J’ai déjà une certaine expérience de la vie par rapport à une ado de 15 ans. Je suis devenue vice-championne du monde pour mon freestyle long sur le thème des « Mille et une nuits ». La chorégraphie d’Adam Solya, mon chorégraphe attitré (également professeur de danse au Conservatoire de Bruxelles), a suscité l’enthousiasme du jury et du public. Pour moi, il s’agit toujours de repousser une nouvelle limite, et ma confiance en moi m’aide à y arriver.

Quiconque pense au patinage artistique pense à des duels au sommet comme celui de Tonya Harding contre Nancy Kerrigan.

Par chance, je n’ai jamais vécu ça. Mes concurrentes et moi ne sommes pas nécessairement les meilleures amies du monde, mais nous nous souhaitons mutuellement bonne chance. Ce genre de situations, où les patins étaient sabotés, ne se produisent heureusement plus.

Le patinage artistique, comme la gymnastique et le ballet, abonde en idées reçues concernant les athlètes et leur poids.

J’ai également eu des problèmes avec les chiffres sur la balance. À 18 ans, j’étais en pleine puberté et j’avais pris des formes de femme. Mon poids était parfaitement normal, mais je me sentais grosse par rapport aux jeunes adolescentes que j’affrontais. J’ai même souffert du syndrome RED-S (Relative Energy Deficiency in Sport), car j’absorbais beaucoup trop peu d’énergie. J’ai frappé à la porte d’une diététicienne qui m’a enseigné comment, quoi et quand manger. J’ai appris à m’aimer et à aimer mon corps.

L’année dernière, une controverse a fait rage autour de votre postérieur.

(Rires) Pour mon freestyle long sur un thème oriental, j’avais choisi une combinaison nude. Même mon short était couleur peau. Certain·e·s juges ont cru que je patinais les fesses à l’air. Le premier modèle était peut-être un peu trop petit et s’est glissé entre mes fesses lors de la première compétition de la saison. Le retirer en pleine chorégraphie aurait été inapproprié, alors j’ai reçu un avertissement. Le short a été légèrement élargi et ce même costume a été nommé aux ISU Awards dans la catégorie Meilleur costume. Je me permets de le signaler au passage...

Parlons paillettes. Vous cocréez vos costumes ?

Absolument. Je m’inspire des tenues de mariage et des costumes de danse. Mes tenues de patinage sont le résultat de l’assemblage de cinq robes différentes : la manche de celle-ci, le dos de celle-là, le décolleté de cette robe... L’image globale est très importante. En patinage artistique, on peut être pénalisé pour un costume qui ne correspond pas au freestyle ou pour un dysfonctionnement de la tenue, comme un fermoir qui se détache. Toutes ces paillettes garantissent une certaine esthétique aux yeux des juges et du public, même de loin. Mes costumes, 100% belges, sont conçus par Severine-Costumages.

Un look qui inclut une bonne couche de maquillage.

Tout à fait. Les juges et les caméras sont loin, donc le maquillage doit être accentué. J’ai appris à me maquiller moi-même après avoir regardé des heures de tutoriels. La laque empêche les cheveux de se mettre en travers du chemin. Pour moi, tout doit être parfait : ongles vernis dans la teinte de ma tenue, maquillage impeccable et cheveux apprêtés.

Vous êtes une véritable star à l’étranger, mais ici, en Belgique, vous pouvez encore faire vos courses sans être dérangée.

En effet. Au Japon, par exemple, on m’arrête dans la rue : des fans se prosternent et me demandent un autographe. Mais au fond, je suis très casanière, je n’aime pas rester longtemps loin de ma famille.

Vous avez quelque cent mille followers sur Instagram. Ça fait partie du job ?

Oui. Dans un petit sport, le sponsoring est important. Je ne bénéficie pas de la même exposition qu’un cycliste, par exemple, et je ne peux montrer mes logos qu’au moment du « kiss and cry » (quand les points sont distribués, avec leur cortège de baisers/larmes, NDLR). Les réseaux sociaux sont donc un moyen enrichissant de mettre en avant mes sponsors. Je reçois un salaire mensuel grâce à mon contrat de sportive de haut niveau chez Sport Vlaanderen, et j’en suis très reconnaissante. Sportoase me soutient et j’ai une voiture par l’entremise du Lauwers Groep. Chaque année, équilibrer le bilan financier s’apparente à un exercice d’équilibriste : à quels concours puis-je (ou non) participer ? Je pense aussi à l’avenir : j’ai un diplôme d’accompagnatrice dans l’accueil extrascolaire et je combine ma carrière sportive de haut niveau avec un bachelor pédagogique pour les maternelles.

Vous êtes également ambassadrice de Chic Sport.

Je suis une grande fan ! Chic Sport est une entreprise anglo-belge. Jenna Mc-Corkell, décuple championne britannique et épouse de la légende belge du patinage artistique Kevin Van der Perren, est la tête pensante de la marque. Celle-ci propose des vêtements d’entraînement fins, chauds et bien ajustés. Parfaits pour le patinage, le jogging, le yoga, la danse... Les imprimés sont originaux. Dans la nouvelle collection Icon, les leggings off-ice et le débardeur au dos original sont mes pièces préférées.

Enfin, à l’approche de la Saint-Valentin, une question s’impose : le sport de haut niveau et l’amour, ça matche ?

Je viens d’entamer une nouvelle relation. Mon petit ami a lui-même fait de l’athlétisme de haut niveau, il me soutient donc pleinement, ce qui est nécessaire. Il fait beaucoup de fitness, il a donc un corps canon. J’espère qu’il m’entend (rires)...

À LIRE AUSSI 

7 femmes belges qui cassent le game à suivre en 2023

Qu'est-ce que le SOPK qui touche une femme sur dix ?

10 sports qui font un corps de bombe