Interview : Chasseur de plantes, un métier rare et passionnant

Publié le 28 mai 2021 par Malvine Sevrin
Interview : Chasseur de plantes, un métier rare et passionnant Shutterstock

D’où viennent les plantes que l’on retrouve dans les compléments alimentaires ? Qui les sélectionne ? Quels sont les critères ? Réponses avec un chasseur de plantes.

Depuis 25 ans, Fabrice Maurice est responsable « Achats & Sourcing de plantes » pour les Laboratoires Arkopharma, spécialisés en médecine naturelle avec leur gamme d'Arkogelules emblématique. Fabrice Maurice, surnommé par ses collègues “l’Indiana Jones” des plantes, sélectionne les matières premières à travers le monde.

En quoi consiste le métier de responsable achats & sourcing de plantes ?

Il s’agit d’identifier et gérer le sourcing de plantes médicinales à travers le monde. J’organise le réapprovisionnement et la mise en culture des plantes déjà existantes dans nos références et je me charge également de dénicher de nouvelles plantes sollicitées par notre service recherche et développement. 

Comment devient-on “chasseur de plantes” ?

Il n’existe aucune école spécifique pour se former à l’achat de plantes. Nous sommes d’ailleurs très peu à faire ce métier en France, peut-être une dizaine tout au plus. Il n’existe pas de grand catalogue des plantes où l’on passe commande ! On apprend ce métier avec le temps et l’expérience et surtout on n’arrête jamais d’apprendre.

Fabrice Maurice
Fabrice Maurice

Quelles sont les compétences requises ?

La première compétence à avoir est une grande connaissance des plantes de A à Z. Il faut aussi être un passionné de Nature en accord parfait avec la nature, connaître la saisonnalité des plantes afin de cibler l’époque à laquelle il faudra acheter ou réserver la plante. Une organisation minutieuse et une capacité à anticiper sont nécessaires afin de prévoir suffisamment à l’avance les récoltes pour pouvoir produire un an plus tard. Une bonne et solide base scientifique est également requise, notamment pour connaître les actifs des plantes médicinales. Enfin, le côté relationnel avec les producteurs et fournisseurs est également essentiel. Il faut être en fusion avec le monde agricole, aimer ce milieu et connaître plusieurs langues pour se faire comprendre à travers le monde. Je pratique quatre langues et je possède de bonnes bases en latin ce qui facilite l’échange lorsqu’on parle de plantes médicinales (car les noms botaniques des plantes sont connus universellement).

Comment se passe la recherche de plantes ? 

Dans un premier temps, j’identifie les pays où les plantes que je recherche poussent dans les meilleures conditions, ensuite j'active mon réseau et j'interroge les producteurs et fournisseurs /récolants pour savoir s’ils sont susceptibles ou non de me proposer ces plantes. Je dois également veiller à ce qu’ils soient en mesure de respecter notre cahier des charges et nos exigences de qualité, aussi bien au niveau environnemental, sociétal et éthique. J’assure également tout le suivi concernant les procédures d’import/export. 

Arkopharma illustration
Arkopharma Laboratoires

Comment sélectionnez-vous les producteurs ?

Avec l’expérience, je connais les spécialités de mes producteurs/récoltants donc je sais généralement dans quel pays et vers qui me tourner en fonction de la plante que je recherche. Au fil des années, j’ai également construit une relation de confiance avec chacun d’eux. Nous réalisons des audits sur place avec notre service qualité et nous leur faisons signer une charte éthique. Ma première mission est d’essayer de diversifier mes sources d’approvisionnement, car c’est très risqué d’avoir un seul et unique fournisseur si la récolte est réduite à néant. Il faut toujours penser à avoir un plan B et un plan C, car dans ce métier c’est toujours dame nature qui commande. 

Quels sont vos critères de qualité ? 

Une fois que j’ai trouvé mon producteur, je réalise une première sélection et je soumets ces échantillons à notre laboratoire. Celui-ci réalise différents types d’analyses pour s’assurer que la qualité de plantes respecte notre cahier des charges. Si c’est le cas, la production ou l’approvisionnement est lancé. Nous avons 80 personnes qui travaillent dans le département qualité, de l'échantillonnage jusqu’au produit fini, et 85 personnes dans le département R&D, ce qui fait d’Arkopharma, le laboratoire le plus d’important d’Europe.

Vous travaillez depuis 25 ans dans ce domaine. Les méthodes ont-elles évolué avec le temps ?

Certaines cultures sont devenues de la haute technologie : certaines sont aujourd'hui réalisées à l’aide de tracteurs connectés à internet par satellite. Mais le principal changement est l’aspect réglementaire qui a énormément évolué au fil des années, notamment concernant le bio. Chez Arkopharma, nous travaillons dans le bio depuis 1993 et sommes certifiés par l'organisme Ecocert. De plus, nous accompagnons les agriculteurs dans cette direction.

gélules photo
Arkopharma Laboratoires

En moyenne, combien de temps dure le sourcing de plantes ? 

Il faut savoir que la plante médicinale, tout comme les fruits et légumes, possède un seul cycle culturel, c'est-à-dire qu’elle ne pousse qu’une fois par an. Ce qui veut dire que si on n’achète pas la plante au bon moment, c’est trop tard. Il faut attendre douze mois de plus. Je dois donc anticiper auprès de mon producteur et prévoir les quantités à faire produire pour tenir la production jusqu’à l’année N+2. Il faut toujours se projeter dans l’avenir et savoir évaluer les quantités à contracter. Compte tenu de ces contraintes, il m’arrive d’acheter une plante un à deux ans à l’avance, bien avant qu’elle n'ait poussé. 

Privilégiez-vous un sourcing local ?

La France est un pays avec un monde rural et agricole très développé. Ma préoccupation majeure est donc tant que possible de faire travailler les producteurs locaux que je connais depuis des années. Prenons le cas de la Reine-des-prés que l’on retrouve dans notre gamme minceur. Son approvisionnement vient à la fois d’un petit producteur français dans le Morvan, mais aussi d’une culture familiale dans la région du Maine-et-Loire. Toutefois, la majorité de nos plantes proviennent d’Europe. Évidemment ce n’est pas toujours possible de trouver les plantes en France, car certaines plantes sont endémiques, c’est-à-dire qu’elles ne poussent que dans certaines régions de la planète. C’est par exemple du Guarana d’Amérique du Sud, de l’Harpagophytum de Namibie, l’orthosiphon d’Indonésie ou encore du Ginseng d'Asie.  Ce dernier est recommandé dans le cas d’un manque de tonus et prend jusqu’à 5 ans pour arriver à maturité.

Est-ce complexe d’être dépendant de la nature ? 

C’est le principal obstacle. C’est la nature qui commande. À la moindre problématique, il peut y avoir une influence ou un impact sur la culture et les récoltes. Le Guarana par exemple, reconnu pour aider à bruler les graisses pendant les régimes amincissants, est lui plutôt récolté en début d’année. Quant aux feuilles d’Artichaut, recommandées afin d’aider à améliorer la digestion, celles-ci sont récoltées au printemps. La vigne rouge, utilisée pour soulager les jambes lourdes, risque de perdre ses belles grandes feuilles rouges en cas d’intempéries quand l’automne s’installe.  Mais cela fait partie de la beauté du métier, car on travaille avec un élément qu’on ne peut pas maîtriser. Cela ajoute parfois une dose d’adrénaline à mon métier, mais je suis là pour trouver des solutions et assurer que la production puisse suivre son cours.

Chaque année les Laboratoires Arkopharma achètent en moyenne 200 tonnes de plantes, ce qui représente 800 millions de gélules. Grâce à la qualité de celles-ci, les Laboratoires ont pu développer les ARKOGÉLULES®, une gamme de phytothérapie emblématique avec près de 80 plantes disponibles, ainsi qu’un concept original : 1 plante/1 gélule. Ce concept permet à chacun de trouver une solution en fonction des plantes qui lui correspondent le mieux pour soulager les maux du quotidien, tels que stress, sommeil, digestion, articulation, immunité, tonus, circulation, minceur, confort urinaire…Afin d’être en adéquation avec les valeurs que les Laboratoires prônent, leur vocation est d’allier naturalité, efficacité, qualité pharmaceutique et innovation technologique pour réaliser leur mission de « Faire de la Médecine Naturelle, la Médecine de Demain ».

 

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