Femme fontaine : l’éjaculation féminine pour les nulles

Mis à jour le 18 avril 2019 par Coco Stellar et Marie-Noëlle Vekemans
Femme fontaine : l’éjaculation féminine pour les nulles

La fable de la femme fontaine. Témoignage. 

Mon amie C. (28 ans) a les yeux rivés sur le panier à linge. « C’est la troisième fois cette semaine. Comme si je n’avais rien de mieux à faire que de laver des draps de lit. » Elle couche depuis peu avec un barman de 26 ans qui fait d’elle une femme libérée. Au propre comme au figuré. Je cherche une solution avec elle : « Tu as déjà essayé une serviette de plage ? »« J’ai tout essayé, mais rien n’y fait. Je suis un véritable geyser ! Hier, ça a même giclé sur le mur à côté du lit. » J’imagine alors une sorte d’Action Painting : l’expressionnisme vaginal tel une ode à la puissance de l’orgasme féminin. « Tu pourrais peut-être l’encadrer ? » « J’espère au moins que ce n’est pas de la pisse... », soupire-t-elle, tout en niant ma question. « Pourquoi moi ? Ce n’est pas comme si cela me procurait le summum du plaisir. Ça t’est déjà arrivé, toi ? » « Honnêtement ? Je ne pense pas. » J’ai un tas de bons souvenirs de parties de jambes en l’air extrêmement humides, mais je n’ai jamais connu l’effet geyser. « Ça vient peut-être de lui ? » « Évidemment ! Il dit qu’il peut faire éjaculer toutes les femmes. Sa seule mission dans la vie, c’est de donner du plaisir. Tu veux que je lui demande d’essayer avec toi ? Comme ça on saura au moins si c’est vrai… » « Arrête tes conneries ! » J’en ai assez entendu. C. examine les draps, les renifle et les porte à la lumière du jour. « C’est quoi au juste ? Ça sent l’eau sucrée et c’est incolore. Ce n’est quand même pas de l’urine, si ? »

UNE SOURCE D’EMMERDES

Le reste de la semaine, dès que j’ai un moment libre, je me plonge dans l’art noble d’éjaculer, de gicler, d’arroser. Pourquoi ce phénomène est-il à la fois tabou et mystérieux ? Est-il réservé à un groupe fermé, voire privilégié ? Ou toutes les femmes peuvent-elles en faire l’expérience ? L’éjaculation féminine transcende-t-elle toute autre forme de partie de jambes en l’air ? Et last but not least : par quel orifice ce liquide est-il expulsé ?

La chercheuse américaine et spécialiste de la sexualité Deborah Sundahl s’est penchée sur le sujet à la fin des années 80. Et en 1992, bien avant que l’éjaculation féminine ne devienne une classe à part sur Pornhub, elle a lancé un tutoriel vidéo qui explique comment récolter le nectar divin.

En résumé, si vous stimulez votre point G (cette zone rugueuse à l’entrée du vagin), vous chatouillez aussi inconsciemment l’éponge urétrale. Ce tissu charnu se trouve entre la paroi vaginale et le pubis, juste à côté du nerf clitoridien. En cas d’excitation du point G, les terminaisons nerveuses de l’éponge sont également stimulées, ce qui peut être ressenti comme une envie subite d’uriner pendant les ébats sexuels. L’éponge stimulée aspire le liquide, qui se libère via le méat urinaire lorsque les muscles vaginaux se contractent. On n’en sait guère plus sur ce phénomène et on ignore encore si chaque femme est susceptible de vivre cette expérience.

La question reste alors de savoir si ce « jus » est de l’urine ou non... En fait, cela dépend de la manière dont vous voyez les choses. La frontière entre la « golden shower » (vous savez, cette pratique sexuelle qui consiste à uriner sur son partenaire) et le « squirt » (l’éjaculation féminine) est très mince. Si une femme éjacule avec une vessie plus remplie que la normale, la couleur sera forcément plus jaune et la substance ressemblera davantage à de l’urine. Si elle a bu beaucoup d’eau, le liquide contiendra proportionnellement plus de glucose. Il sera alors plus sucré et incolore. La quantité varie d’une cuillère à café à un mug XXL. Et si certaines éjaculations féminines sont discrètes, voire imperceptibles, d’autres peuvent repeindre les murs de la chambre avec la puissance d’un pistolet haute pression. J’ai lu qu’il existe aussi des éjaculatrices clandestines. Comprenez : ces femmes qui libèrent subtilement une infime quantité de liquide, plus proche de la petite averse que de la pluie abondante.

ALORS, HEUREUSE ?

J’avais enfin trouvé l’excuse parfaite pour combiner porno et boulot. Sur Redtube et Pornhub, j’ai donc visionné des dizaines de vidéos de femmes fontaines qui hurlent de plaisir comme si elles connaissaient le super orgasme intergalactique. Quel contraste avec ma copine C. que tout ça incommode plus qu’autre chose. Quelques recherches plus tard, j’apprends que le terme a été googlé 1.200 % plus souvent en 2018 qu’en 2008. Le squirt (mot anglais qu’on traduit par « faire gicler », NDLR) est-il devenu une sorte de tendance sous l’influence de la pornographie sur Internet ? La réponse demande une étude approfondie sur le terrain… Pendant plusieurs semaines, je bombarde mes amies, collègues et (grands-)tantes de questions improbables : « Fais-tu partie des femmes fontaines ? » « C’est sympa ? » « Ça t’arrive souvent ? » « Quelle est la puissance de ton jet ? » Résultat : des fous rires et des moments gênants, mais surtout des entretiens très intéressants.

Catherine (32 ans) : « Ça m’arrive de temps en temps quand je me masturbe, lorsque je stimule l’entrée de mon vagin avec mon index. Au début, je ressens une envie d’uriner. Ensuite, le liquide est expulsé au fur et à mesure par petites vagues vers l’extérieur. Ça me fascine, mais ça ne rend pas mon orgasme différent ou meilleur. En tout cas, je vous conseille d’avoir une serviette à proximité ! »

Liv (46 ans) : « J’ai eu une relation avec un homme qui pouvait faire éjaculer n’importe quelle femme, du moins c’est ce qu’il prétendait. En tout cas, ça marchait chez moi. Parfois, ça me procurait une sensation agréable et un orgasme plus intense. Mais souvent, j’éjaculais sans jouir. Me conduire à l’éjaculation était son but ultime. Après six mois, j’en ai eu assez. Pour moi, la qualité de l’orgasme prime de loin sur l’éjaculation. »

Marie (72 ans) : « J’en ai fait l’expérience une fois avec ton oncle Marcel lorsque nous étions jeunes. Il pensait que j’avais uriné de peur en voyant son engin de guerre pour la première fois. Nous en avons beaucoup ri. Il avait peut-être raison... »

Laure (29 ans) : « Ça m’est arrivé une seule fois. Mon petit ami était en train de me faire un cunni et, tout à coup, l’inondation. Je n’ai rien compris, je n’ai même pas eu d’orgasme. Pour lui, c’était génial et il s’est empressé de raconter à tous ses copains qu’il m’avait fait éjaculer comme une dingue. Alors que ça ne signifiait rien pour moi… Heureusement, j’ai un mec beaucoup plus attentionné aujourd’hui. »

Isabelle (37 ans) : « Parfois, mais pas toujours. Quand ça se produit, mon mari et moi trouvons ça très excitant. Je ne sais pas si c’est la garantie d’un orgasme plus intense, mais je trouve que l’idée est sexy. Ça nous excite tous les deux énormément, et ça débouche sur des ébats chauds et humides. Ça doit rester sporadique, sinon ça perdrait de son attrait. Je remarque aussi que moyennant un peu d’entraînement, on obtient de meilleurs résultats. »

Nadia (21 ans) : « Ça m’est arrivé une fois avec mon petit ami parce qu’il avait beaucoup insisté. Son ex y arrivait, alors pourquoi pas moi ? Je m’étais un peu exercée, mais ma meilleure amie m’a conseillé de mettre fin à cette relation. Quand il m’a demandé de lui donner le motif de notre rupture, je lui ai répondu sèchement : “Mon ex arrivait à me faire jouir, pourquoi pas toi ?” »

Nathalie (42 ans) : « Ça ne m’est jamais arrivé, je n’y ai même jamais réfléchi. Je passe à côté de quelque chose ? »

MY JUICES ! MY JUICES !

En approfondissant mes recherches, je découvre que la fascination pour le porno des femmes fontaines est plutôt l’apanage des hommes, comme le reconnaît l’experte en la matière Deborah Sundahl : « Lorsque j’ai réalisé des tutoriels, je pensais qu’ils allaient surtout être utiles aux femmes. Mais après quelques mois, j’ai remarqué que mes livres et vidéos avaient surtout du succès auprès des hommes. En soi, il n’y a pas de mal à ce que ceux-ci s’intéressent à l’anatomie féminine, mais les choses se corsent quand le squirt devient un art qu’ils étalent sur la place publique. S’ensuit alors la pression de la performance pour les deux parties, alors que je veux juste que tout le monde se détende et s’amuse. »

Mais pourquoi les hommes courent-ils après le squirt ? Il ne faut pas aller chercher la réponse bien loin. Alors que l’orgasme féminin est enfoui dans des terminaisons nerveuses, l’éjaculation se fait beaucoup moins discrète. Elle est à la fois théâtrale et quantifiable. Et les hommes de penser que la puissance du jet est liée à l’intensité de l’orgasme. Alors que ce n’est pas forcément le cas.

En regardant une vidéo impressionnante d’une actrice porno qui se masturbe et éjacule tout en criant « My juices ! My juices ! » à… nobody, je réalise que le porno ne permet certainement pas de faire avancer le Schmilblick. L’éjaculation féminine est en passe de devenir le énième cerceau dans lequel nous, les femmes, devrons sauter pour prouver que nous sommes des bombasses au pieu.

Le sexologue Ian Kerner confirme cette hypothèse: «À l’heure où de nombreux hommes confondent pornographie et réalité, les femmes ressentent de plus en plus de pression. Je connais des filles qui ont tellement envie de se familiariser avec cette technique qu’elles brutalisent leur corps et finissent par abîmer leur plancher pelvien. Alors oui, évidemment, un liquide se retrouve expulsé dans ces cas-là... »

Breaking news ladies : l’incontinence à un jeune âge n’a rien de sexy. Accordez donc un peu de répit à votre pauvre vagin. Aucun homme ne peut vous forcer à éjaculer et s’il le fait, mettez-le au défi d’éjaculer jusqu’au plafond. Comme votre ex savait si bien le faire. Ou prenez-vous pour une vraie star du porno et buvez un litre d’eau une demi-heure avant de grimper aux rideaux. Libérez-vous quand vous en ressentez l’envie et criez le plus fort possible My juices ! My juices ! Bienvenue dans la réalité les gars : la plupart des actrices pornos se contentent d’uriner. Tout simplement.

ET LES HOMMES DANS TOUT ÇA ?

Face à la déferlante, mes amis masculins ont eux aussi leur avis éclairé sur la question.

Maxime (37 ans) : « Je vais être honnête. Je ne suis jamais parvenu à faire éjaculer une femme. Mais j’ai déjà essayé en secret… Faire jouir une femme, ça je sais faire, heureusement. »

Antoine (27 ans) : « Ma copine détient le brevet de l’éjaculation féminine. Je ne fais rien de spécial, je suis incapable de l’expliquer. Elle a un peu honte, elle trouve ça dégueu. Mais ça se passe bien au lit entre nous, c’est le principal. »

Thomas (34 ans) : « Hein ? Éjaculation et orgasme ne vont pas de pair chez les femmes ? »

Thibaut (26 ans) : « J’arrive à faire éjaculer presque toutes les femmes. Je me suis un jour intéressé à la technique et je l’ai apprivoisée sans grandes difficultés. Il y a un tas de tutos en ligne. Avec mon index et mon majeur, je stimule cette zone rugueuse à l’entrée du vagin. De plus en plus fort, tout en respectant un certain rythme et en répétant à ma partenaire de se laisser aller. J’ai l’impression que mes propos rassurants jouent beaucoup. Peut-être s’agit-il plus d’une question de mental que de physique... Beaucoup de femmes peuvent éjaculer, mais elles se retiennent parce qu’elles trouvent ça sale. Il s’agit donc plutôt de quelque chose qu’elles s’efforcent de ne pas faire. La première fois, l’éjaculation féminine prend du temps. Ensuite, elle a tendance à se manifester de manière plus ou moins régulière (mais pas systématique). Si ça te dit, je peux te montrer ? »

L’éjaculation féminine ne suscite pas encore un véritable engouement auprès de l’homme belge lambda. Il sait que ça existe, mais il ne peut pas mettre le doigt dessus de manière précise. À l’exception de quelques-uns qui aiment s’en vanter et en font leur marque de fabrique.

LE POINT G… EUH LE POINT FINAL

Aucun homme ne peut vous forcer à éjaculer. À vous d’avancer à tâtons, de tracer votre propre voie si vous en avez envie. Vous trouverez une foule de tutos en ligne, ainsi que des trucs et astuces pour les éjaculatrices en devenir. Je suis bien placée pour le savoir, puisque j’en ai testé plusieurs. Honnêtement ? Rien de très probant. Ni tsunami ni fontaine. J’ai bien remarqué un liquide mystérieux par-ci par-là, mais Dieu seul sait d’où il venait. J’étais tellement occupée à prendre mon pied que je n’ai pas cherché plus loin. Je suis peut-être une éjaculatrice clandestine... Mon amie C. m’a proposé trois fois les services de son sex friend, mais j’ai refusé poliment. L’éjaculation est un cerceau dans lequel je ne vais pas sauter. Si vous voulez tenter l’expérience, c’est tout à votre honneur. N’oubliez pas de vous hydrater, de boire 1,5 litre d’eau par jour et de garder un chiffon à portée de main...

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