Le Salento ne se visite pas, il se traverse comme un roman : avec lenteur, avec passion, avec un goût pour les histoires qui laissent des traces. Dans cette région du sud des Pouilles, bercée par la lumière et les souvenirs, certaines adresses ne sont pas de simples lieux de séjour, mais des chapitres vivants d’une mémoire intime. C’est le cas de La Fiermontina à Lecce, une maison habitée par l’art et les fantômes d’un amour fou, celui d’Antonia Fiermonte et des deux artistes qui l’ont aimée. Une saga familiale transformée en expérience sensorielle, à vivre entre sculptures, oliviers et coucher de soleil. Et au-delà de Lecce, d’autres trésors du Salento attendent les voyageurs curieux : falaises spectaculaires, abbayes oubliées, villas mystérieuses… Suivez le guide !

Dormir dans un musée, s’aimer comme en 1940

Il y a des histoires d’amour qui défient le temps, qui survivent aux adieux, aux distances et aux silences. Celle d’Antonia Fiermonte, René Letourneur et Jacques Zwobada en fait partie. À 17 ans, la jeune violoniste et artiste peintre rencontre René, sculpteur talentueux qui remporte le Grand Prix de Rome. Il tombe fou amoureux d’elle, l’emmène en France, en fait sa muse et l’épouse. Mais un autre homme veille dans l’ombre de cette passion : Jacques Zwobada, le meilleur ami de René. Un artiste éclectique qui perd la tête pour Antonia. Elle résiste des années avant de succomber. Elle quitte René pour Jacques, puis disparaît trop tôt, à 42 ans. Dévasté, Zwobada lui érige un mausolée à Mentana. René, lui aussi anéanti, se rapproche de son ancien ami. L’amour les a unis, puis séparés, avant de les réunir autrement. C’est cette histoire hors du commun qui a inspiré leurs petits enfants, Antonia Yasmina et Fouad Giacomo Filali, à ouvrir La Fiermontina Luxury Home et Le Fiermonte Museum à Lecce. Deux lieux, deux hommages vibrants à une aïeule qui a fait chavirer des cœurs et marqué l’histoire de l’art.

Passer les portes de La Fiermontina, c’est entrer dans un sanctuaire où l’art et la mémoire dansent ensemble. Nichée au cœur de Lecce, dans une oliveraie centenaire, cette demeure capture l’âme du Salento. Ici, chaque pierre murmure un souvenir, chaque sculpture semble prête à s’animer sous le clair de lune.

“Ce n’est pas un hôtel, c’est une maison où l’on a ramené Antonia”, confie Antonia Yasmina Filali. “On lui a ouvert un espace pour qu’elle puisse continuer à exister. Ce projet, c’est notre façon de la retrouver.” Pour une immersion encore plus totale, il faut également passer une nuit au Fiermonte Museum, quelques mètres plus loin. On s’endort dans une galerie, parmi les œuvres qui racontent une vie consumée par l’amour et l’art. La nuit venue, une lanterne à la main, les visiteurs peuvent parcourir le musée seuls, dans un silence complice. Une façon d’abolir la distance entre l’œuvre et celui qui la contemple. “L’art doit être immersif. On doit pouvoir le toucher, le ressentir, lui parler même. Les musées créent souvent une distance entre le spectateur et l’œuvre. Ici, on veut recréer une intimité, une conversation entre le visiteur et notre histoire.” Comme un dernier clin d’œil à son aïeule, Antonia Yasmina Filali publie en avril “Retour à Casamassima”, un livre qui revient sur cette saga où l’amour et l’art se mêlent, entre l’Italie et la France.

À partir d’avril, chaque chambre proposera une expérience immersive : workshop vidéo, mise en musique de films personnels, plongée dans la sculpture… Parce que l’art ne se regarde pas, il se vit.

Infos pratiques

La Fiermontina Luxury Home – Le Fiermonte Museum – Le Palazzo Bozzi Corso ) Zéphyr Restaurant (pour une cuisine locale réinventée). Pour réserver : www.lafiermontinacollection.com

Le Salento, entre falaises et basilicas

Mais Lecce n’est qu’une porte d’entrée. Le Salento dévoile ses merveilles à ceux qui prennent le temps de s’y perdre. Yasmina a ses endroits fétiches :

  • Les falaises de Sant’Andrea, spectaculaires, où la roche blanche plonge dans l’Adriatique.
  • L’abbaye de Santa Maria di Cerrate, un bijou byzantin ressuscité, loin du baroque envahissant de Lecce.
  • La basilique Santa Caterina d’Alexandrie, à Galatina, avec ses fresques gothiques saisissantes.
  • Les villas orientales abandonnées de Lecce, vestiges fascinants d’une autre époque.
  • Et pour prendre la route, rien de tel qu’un détour par la Scenic Road de l’Adriatique, entre villages marins et criques secrètes.
Pouilles

Basilica di Santa Caterina d’Alessandria. ©Shutterstock

Le meilleur moment pour venir selon Yasmina ? “Octobre et novembre, sans hésitation. La lumière est sublime, la mer encore chaude, et c’est la saison des olives. Le Salento retrouve son authenticité loin de la foule estivale.”