Lomepal à Dour : il va te toucher dans l’coeur

Publié le 11 juillet 2018 par Grégory Escouflaire

En quelques mois seulement, Lomepal est devenu une star du rap game. "Flip", son premier album sorti l'été dernier, a cartonné grâce à ses tubes fédérateurs, entre bangers à la française et pop urbaine qui "touche dans l'coeur (aïïïe aïïïe)". On l'a rencontré avant son passage à Dour. Qui s'annonce très chaud.

L'interview oklm de Lomepal

"Flip" est sorti y a un an. Il s’en est passé des trucs depuis.

Ouais ! (rires) Ça a bien monté, ça fait plaisir, c’est mon premier projet qui marche vraiment…

Comment tu gères ?

Ça va je suis bien entouré, c’est ça le principal. J’ai une bonne équipe qui m’aide à gérer ça.

La célébrité ?

Ça va ! Je continue à prendre le métro et à marcher dans la rue. On me reconnaît tout le temps mais je me débrouille pour me cacher un petit peu. J’ai pas envie de commencer à vivre une vie de mec qui se cache dans un Uber et qui voit plus rien ! J’ai envie de vivre normalement… Si je me fais arrêter de temps en temps, c’est pas grave.

Crédit : Julie Oona

Ça a quand même changé des trucs ou pas ?

Avec les filles c’est encore plus facile ! (sourire)

Pourquoi ça cartonne selon toi ?

Je sais pas… Les gens me répètent que c’est honnête. Ça leur fait du bien. Le côté humain. J’imagine que ça doit être ça. C’est ce que j’essaie de mettre en avant en tout cas. De pas mettre de filtre. De transmettre des émotions brutes, quoi. De pas trop me déguiser.

C'est clair que cette tendance s'affirme dans le hip hop en ce moment. Moins d’artifices. Moins de frime.  

Ben elle est maîtrisée cette frime. Moi je frime aussi, mais c’est une frime… conceptuelle ! On peut s’amuser sur certains morceaux, mais en vrai il y a plus d’humilité. En tout cas autour de moi il y a plein d’artistes qui font leur truc et qui n’ont pas besoin de s’inventer du vécu...

C’est pas de la mise en scène. 

Il y a des personnages qui marchent aussi, hein. Mais ce que les gens aiment chez moi, c’est le côté sincère. C’est pour ça que j’essaie de l’être vraiment. Faut pas que je perde ce truc-là.

T’es sur le suivant, là ? Ça se passe bien ?

Ouais ! Mais c’est plus long que ce que je pensais... Là je suis en pleine recherche, mais j’avance.

Tu chantes de plus en plus. Sur la "Deluxe Edition" de "Flip" sortie en février, il y a des versions acoustiques (guitare-voix) de six titres de l'album. Tu te diriges vers ça ?

Je sais pas si je pourrais faire un morceau directement comme ça... Parce que j’aime toujours le concept d’avoir des morceaux qui tapent avec des kicks et de la basse ! Mais j'adore aussi en faire des versions acoustiques, c'est clair. Je sais pas… On verra plus tard !

Les frontières entre les genres s’amenuisent. Même Booba s'y est mis avec l'Auto-Tune

À mort. C'est variété en fait ! Moi de toute façon je m’éloigne des codes : je veux juste faire mon truc et pas rester enfermé. J’ai pas envie de me limiter. Me travestir sur la pochette, chanter, faire des morceaux vulnérables, c’est une manière de faire mon truc à moi sans me soucier des autres. J’avais pas envie de faire partie d’une école. J’avais pas du tout envie d’être le nouvel élève. Même si j’aurais pu devenir le meilleur élève.

Quand t’étais ado tu traînais qu'avec des rappeurs ?

Si j’ai commencé à rapper c’est parce que je traînais avec des gars qui rappaient, ouais. Au début j’étais vraiment à fond dans ce truc d’école et je voulais être le meilleur. J’ai fait que rapper pendant des années. Pur et dur. Juste des rimes qui intéressaient que les rappeurs. Des rimes qui faisaient genre 8 ou 9 syllabes et que personne écoutait à part nous. Et au bout d’un moment ça m’a saoulé. J’avais envie de faire mon truc à moi. J’ai arrêté de rapper avec mes potes. C’est fini tout ça. Ça fait des années.

Quid de cette pochette ? Sur laquelle on te voit déguisé et maquillé en femme. Ça me fait penser au glam metal des années 80. À des groupes comme Poison ou Twisted Sister, qui se travestissaient à mort comme pour souligner, a contrario, leur hyper-masculinité. C'est ça le "flip" du titre ? Cette dynamique de retournement ? (pour rappel le "flip" est une figure de skate où le skateur fait vriller sa planche autour de son axe longitudinal, lui faisant effectuer une rotation de 360°) 

Ouais, c’est vrai. Alkpote me disait que j’étais un homme de faire ça. De me maquiller en pute ! (rires) Ça prouvait que j’étais un homme. « T’es un homme de t’être mis en pute sur ta pochette ! » (rires) Peut-être que le fait de le faire soi-même ça montre que tu contrôles. Que t’assumes tout. En tout cas cette pochette m’ouvre plein de significations... Peut-être plus que ce que j’avais imaginé !

Et en parlant de skate, c'est un sport qu'on associe souvent au punk, à une certaine culture indé... Pas trop au rap en fait. 

Moi je l’ai pas connu cette scène-là, vu que j’ai commencé dans les années 2000. Du coup c’était déjà complètement explosé dans les styles : y avait des mecs en jogging gros baggy soundsystem rap, des gars plus trash comme les Américains de Baker… D’ailleurs la vidéo « Baker 3 » (du nom de la marque de skateboard, ndlr), j’en ai mis des extraits dans « Bryan Herman ». Dans cette vidéo-là si t’écoutes les musiques et les styles des gars, t’as de tout. Du gros gangsta rap, du punk, du gros rock,…  Et c’est comme ça que j’ai fait ma culture. Des Sex Pistols à David Bowie, des Cramps aux Cure…

Et Janis Joplin (le refrain de "Pommade"), donc. 

Ouais c’est pas Janice dans « Friends » ! Mais bon la personne qui a le plus la voix cassée sur terre, c’est Janis Joplin ! Elle et Lemmy de Motörhead, quoi !

Et toi-même tu chantes maintenant... Qu’est-ce qui t’a mis en confiance ?

C’est venu petit à petit. Je pense que ce qui met le plus en confiance, c’est de faire quelque chose dont on est content... Le fait d’enregistrer un morceau et de se rendre compte que ta voix est cool. Tu deviens un peu fan de toi-même ! (rires) C’est comme un gâteau qui sort du four. C’est pas encore prêt pour les autres mais pour toi c’est énorme. Quand ça sonne bien, tu sais.

On se lasse parfois de ses propres morceaux ?

Avant oui, parce que je faisais du rap et qu'il n'y avait pas mille manières d’interpréter les morceaux… Mais maintenant que je mets des mélodies partout, je fais des variantes, je change les harmonies,… Un morceau comme « 70 » j’ai dû le chanter une centaine de fois en faisant le refrain pareil, et maintenant je passe à la tierce au-dessus (il chantonne), et je fais des mélodies et des harmonies différentes et ça change tout. Du coup je prends du plaisir à refaire vivre des morceaux différemment, quoi.

Les rappeurs belges ? Paraît que t'es pote avec Caba(llero) depuis longtemps ?

C’est un de mes meilleurs amis. On se connaît depuis 2011. On s’est rencontré via Internet. Y avait ce gars de Namur, Patee Gee, qui avait fait un track avec Walter, un pote à moi, auquel j’avais participé… Il connaissait Caba, qui a partagé le morceau, puis je lui ai envoyé un message pour lui dire que j’étais fan, lui pareil… Bref on est devenu potes très vite et on a fait un projet ensemble, « Le singe fume sa cigarette ». On a trop de points communs, c’est ouf.

Et t'écoutes quoi, là ? 

J’écoute pas tellement de rap en fait… À part les disques de mes amis : Cabba & JeanJass, Roméo, Damso,… Orelsan, Booba,… Sinon j’aime beaucoup London O’Connor, les Strokes, et Duran Duran aussi !

« The Chauffeur » ?? 

Ouais comment tu sais ?? Parce qu’il est pas très connu ce morceau…

Ben euh c’est mon morceau préféré de Duran Duran !

Ouais moi aussi ! Incroyable… En fait c’est marrant parce que ce morceau c’est de la trap ! L’instru. Quand la batterie part, là (vers 1'08', ndlr). J’adore ce morceau, vraiment.

Un disque : "Flip" (Pienale Prod/PIAS)

Lomepal est en concert ce dimanche 15 juillet au Dour Festival et le samedi 25 août aux Solidarités