Le talent à suivre : Vanessa Schindler

Mis à jour le 13 février 2018 par Elisabeth Clauss
Le talent à suivre : Vanessa Schindler

Grand Prix du jury Première Vision et Prix du Public de la Ville d'Hyères lors du  prestigieux festival de Mode en avril dernier, elle a présenté une collection innovante de « méduses haute couture », servie par un univers naturaliste synthétique de sirène un brin vénéneuse.

Pour Bertrand Guyon, président du jury et directeur artistique de la maison Elsa Schiaparelli, "le choix de Vanessa Schindler s'est imposé presque comme une évidence et le Grand Prix du jury Première Vision lui est attribué à l'unanimité. Une émotion poétique et raffinée. L'utilisation très subtile d'une matière pourtant pauvre associée à la fausse fourrure, au jersey, à séduit le jury. Une alchimie inattendue, semblable à la plus précieuse des broderies qui semble bouger avec le corps. Une beauté sensuelle et délicate, féminine et forte à la fois."

A 29 ans, la grande lauréate « mode » du festival est diplômée de l'HEAD à Genève. Avant d'arriver à Hyères, elle a mené des stages chez Etudes-Studio à Paris, chez Balenciaga, et à Copenhague chez Henrik Vibskov, designer danois réputé. Sa collection reflète avant tout un projet de recherche. « J'explorais une manière de mouler le textile, de sortir des volumes 3D d'une façon radicale, de m'extraire des coupés/surpiqués classiques. Je rêvais d'une matière plastique à couler sur les étoffes. J'ai contacté des écoles d'ingénierie, rencontré des artisans, testé des consistances liquides, gommeuses et transparentes. Et j'ai découvert l'uréthane. » Le reste, c'est de la création empirique. Elle a enclenché l'aventure d'une collection aux lignes coupées bords francs, et plus que de l'esthétique, elle aboutit à une innovation dans le domaine du montage des pièces. Grâce à la fusion de textile, son geste est devenu plus spontané dans la conception du vêtement, elle a dessiné des formes, monté les pièces de manière tranchée et directe. Dans ces motifs qui sont en réalité de la matière pure, on distingue l'univers marin de crustacés incrustés. « Je faisais mes tests un soir, en regardant d'un œil un documentaire télévisé sur l'architecte américain Bruce Goff, qui avait construit des maisons futuristes avec les meubles suspendus dans les années 50-60. On y voyait la Bavinger House, avec des fontaines émergeant de cette maison troglodyte surréaliste. Le liquide figé de l'uréthane se prêtait bien à la réflexion qui en découlait. »

Avec sa bourse, Vanessa entend financer une nouvelle collection pour l'édition 2018 du Festival. Ainsi, la bulle est bouclée. Grâce au soutien des Métiers d'Art de la Maison Chanel, elle aura l'opportunité de travailler avec les ateliers de la Maison Lesage et de la Maison Lognon, notamment. « Ce qui m'intéresse au-delà de tout, c'est de remettre en question le montage des vêtements, de réinventer l'artisanat, de voir comment on peut encore monter des collections actuellement en atelier. Le procédé que j'ai proposé ici permette une rapidité de réalisation extrême. Les coutures sont remplacées par des collages d'uréthane. Vanessa a tout simplement inventé la Couture seamless...