Jeux Paralympiques : qui sont nos athlètes belges extraordinaires ?

Mis à jour le 23 juin 2024 par Maya Toebat et Noemi Dell'aira
Jeux Paralympiques : qui sont nos athlètes belges extraordinaires ? © Presse

À travers toute la Belgique, des sportifs et sportives de haut niveau se préparent pour les Jeux olympiques de Paris. Trois athlètes se distinguent par leur détermination face aux défis supplémentaires qu’elles doivent surmonter. Elles partagent avec nous les limites physiques et mentales qu’elles repoussent au quotidien.

Manon Claeys

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Les parents de Manon Claeys lui ont laissé le choix de pratiquer n’importe quel sport, avec pour seule condition qu’une fois engagée dans une voie, elle aille jusqu’au bout. Peut-être à cause de son grand-père, maréchal-ferrant de son état, son intérêt s’est rapidement tourné vers l’équitation. « J’étais trop jeune pour m’inscrire dans un manège, alors je suis allée avec mes parents chez un couple d’amis qui avait des poneys », nous confie-t-elle. « Peu de temps après, j’ai rejoint l’association équestre d’Oedelem Beernem, où j’ai également participé à des compétitions de dressage et de sauts d’obstacles. Ce qui me plaît dans ce sport, c’est la responsabilité qu’on endosse envers soi-même, mais aussi envers un animal. Mon cheval est mon meilleur ami. De plus, lorsque je suis en selle, je suis totalement concentrée : il n’y a que mon cheval et moi. » C’est justement quand on n’est pas attentif à 100 % que la vie peut basculer en un instant.

À l’âge de 21 ans, elle décide de faire une balade équestre en tongs et en jeans. À peine juchée sur le cheval, celui-ci prend peur et la projette vers l’arrière, la faisant tomber sur le béton. « J’avais mal partout, mais je sentais encore ma jambe, alors le secouriste m’a redressée. J’avais déjà trois vertèbres brisées, mais une autre a été poussée contre ma moelle épinière. J’ai été immédiatement emmenée à l’hôpital pour une opération d’urgence. À mon réveil, la première chose que j’ai demandée a été : est-ce que je pourrai encore monter à cheval ? » Ça prendrait un certain temps. « Les premiers mois, j’avais la rage contre le monde entier. Un jour, ma grand-mère m’a téléphoné à l’hôpital pour me dire qu’il y avait un film sur les chevaux à la télévision. C’était l’histoire d’une fille dont les jambes étaient paralysées, mais qui pouvait encore bouger grâce à un tronc robotisé. Elle se trouvait dans une situation bien plus difficile que la mienne, mais elle s’en sortait. Moi, j’avais la chance de pouvoir encore marcher. Forte de cette prise de conscience, j’ai décidé de positiver. » Le parcours fut long et exigeant. Après l’accident survenu en 2007, elle a suivi une rééducation pendant deux ans, et elle n’a pu renouer avec la compétition qu’en 2016.

Je crois que les athlètes valides sont des individus puissants, mais les athlètes paralympiques le sont d’une manière encore plus impressionnante.

« Le plus dur a été d’apprendre à trouver la paix intérieure. Lorsque je suis remontée à cheval, j’ai été confrontée à tout ce que je ne pouvais plus faire. La force dans ma jambe et dans mon bras droits est réduite de 30 %. J’ai bataillé ferme pour transformer chacune de ces lacunes en quelque chose de positif. Je crois que les athlètes valides sont des individus puissants, mais les athlètes paralympiques le sont d’une manière encore plus impressionnante. » Cet esprit de persévérance est décisif pour exceller au plus haut niveau mondial. Manon, sous contrat avec Sport Vlaanderen, s’entraîne à fond en vue des Jeux. « Ces compétitions constituent le point culminant. On se prépare pendant des mois pour montrer, en cinq minutes, de quoi on est capable. Un bon résultat génère une satisfaction immense. C’est aussi une formidable manière de récompenser les efforts de mon équipe : mon cheval, le vétérinaire, mon compagnon, mes parents, l’entraîneur, le psychologue du sport… Chacune de ces personnes en coulisses revêt une importance cruciale. »

Man-Kei To

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Imaginez : un beau matin, vous prenez place à l’arrière d’une voiture, et l’instant suivant, vos jambes ne répondent plus. C’est ce qui est arrivé à Man-Kei To. « On m’a emmenée d’urgence à l’hôpital après l’accident, où je me suis entendu dire que ma moelle épinière avait été touchée », raconte-t-elle. « Au départ, on ignorait l’étendue des dégâts, et j’espérais secrètement que tout s’arrangerait. À l’époque, j’étudiais la kinésithérapie à Gand, ce qui m’a aidée : je comprenais ce que les médecins disaient et à quoi servaient les exercices de rééducation. Je pensais simplement que je devrais me donner à fond pendant un an, au terme duquel je serais tirée d’affaire. »

La paralysie survient du jour au lendemain, mais la prise de conscience est plus lente. La première année, Man-Kei a mis de côté ses études pour se consacrer à la rééducation. Par la suite, elle s’est réorientée vers une formation en optométrie tout en poursuivant deux buts principaux : se rétablir et obtenir son diplôme. « Au bout de trois ans, n’ayant toujours pas atteint mes objectifs, j’ai traversé une période difficile, d’autant plus que ma recherche d’emploi se révélait laborieuse. » Man-Kei finit par décrocher un job dans le secteur médical, libérant ainsi du temps pour développer sa vie sociale et s’adonner à ses loisirs. « À la recherche d’un sport social, j’ai pensé au tennis en fauteuil roulant, car j’y avais joué dans mon enfance. C’est alors que j’ai découvert le parabadminton, qui m’a semblé plus accessible (rires). J’ai immédiatement été conquise par ce sport et je n’ai plus envisagé autre chose. »

Au parabadminton, personne ne me dévisage, et nous avons traversé des épreuves similaires, ce qui facilite le partage d’expériences.

Man-Kei se rendait au club une fois par semaine, par pur loisir. L’idée de devenir une athlète de haut niveau ne lui avait jamais traversé l’esprit. Mais son entraîneur nourrissait d’autres ambitions à son égard. Prenant la mesure de son talent, il a réussi à lui faire réaliser son potentiel. Elle a commencé à participer occasionnellement à des compétitions, y compris à l’étranger, accumulant des victoires de plus en plus décisives. « Fin 2019, j’ai pris une décision : j’aime ce sport, je suis encore jeune et si je veux faire l’expérience des Jeux, je dois désormais m’investir à fond. J’ai décroché un contrat de sport de haut niveau et je m’entraîne aujourd’hui plusieurs heures par jour, du lundi au vendredi. »

Qu’est-ce qui l’attire autant dans le badminton ? « Le sentiment de pouvoir exceller dans une discipline en tant que personne en situation de handicap. Mais aussi le contact avec d’autres personnes porteuses d’un handicap. J’avais soigneusement évité ce type d’échanges dans les premières années qui ont suivi mon accident. Au parabadminton, personne ne me dévisage, et nous avons traversé des épreuves similaires, ce qui facilite le partage d’expériences. Ça a changé ma vie. Plusieurs fois par an, nous organisons des rencontres informelles avec d’autres joueurs et joueuses européen·ne·s de badminton en fauteuil roulant, juste parce qu’on a envie de se voir. Sur le terrain, nous sommes des concurrents, mais en dehors, nous sommes devenus de véritables amis. »

Léa Bayekula

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Bien que Léa Bayekula soit l’une des meilleures sprinteuses au monde, le sport n’a pas toujours relevé de l’évidence à ses yeux. L’athlète de 28 ans est née avec une malformation de la colonne vertébrale qui l’empêche d’utiliser normalement ses jambes. Cependant, sa famille n’en a pas fait un obstacle. Ses parents ont aspiré à lui offrir une vie aussi normale que possible. Petite, elle rêvait de faire du cheval et ils ne se sont pas privés de l’emmener au manège le plus souvent possible. En grandissant, elle a réalisé que son handicap n’était pas compris par tout le monde. « Le regard des autres a compliqué les choses », se souvient-elle. « Je fréquentais une école primaire ordinaire, mais je n’avais par exemple pas le droit de participer aux cours d’éducation physique. À l’époque, je trouvais ça très injuste, mais d’un autre côté, je savais que les enseignant·e·s n’étaient pas formé·e·s pour s’occuper d’élèves porteurs d’un handicap. Maintenant que je suis une athlète de haut niveau, je me rends régulièrement dans les écoles : je veux aider les personnes valides à mieux comprendre celles et ceux qui vivent avec un handicap. »

Léa dégage une force indéniable depuis qu’elle a découvert le parasport. « J’ignorais que les personnes handicapées pouvaient s’épanouir dans le sport », poursuit-elle. « J’ai rejoint un club de basket-ball en fauteuil roulant grâce à des amis, ça a été une période formidable. Le sport m’a fait du bien à un moment où j’en avais besoin. » Après le basket-ball, elle s’est mise à l’athlétisme en fauteuil roulant : une révélation. « C’était vraiment fait pour moi ! » C’est surtout le côté solitaire qui lui a plu : « Il n’était pas question de responsabilité collective, je devais me mesurer à moi-même. » Ce qui a débuté comme un simple passetemps est rapidement devenu un objectif de vie et une profession.

Je veux aider les personnes valides à mieux comprendre celles et ceux qui vivent avec un handicap.

Cette année, elle espère participer à ses premiers Jeux paralympiques. « Je m’entraîne pour les 100, 400 et 800 mètres. J’ai deux sessions d’entraînement par jour, avec une pause de quatre heures entre les deux, ainsi qu’une séance de kiné. J’apprécie cet entraînement intensif, car plus je progresse, moins je souffre pendant la compétition. » Lorsqu’elle ne s’entraîne pas, elle étudie l’anglais à distance, histoire de faciliter la communication avec son coach Arno Mul et les autres athlètes pendant les compétitions. Ces rencontres revêtent une valeur inestimable : « Les personnes que j’ai croisées grâce à l’athlétisme m’ont aidée à consolider ma confiance en moi. C’est crucial dans le sport. La force mentale change la donne : lorsque le corps flanche, l’esprit prend le relais et peut déplacer des montagnes. »

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